LA NOTE DE LA JAGGS TEAM :
GLOBALE
COSTUMES
Babylon, le dernier film de Damien Chazelle, sort le 18 janvier.
S’il reste irréprochable sur le plan technique, Babylon n’est pas fait pour tout le monde en raison de certains choix stylistiques très particuliers.
Analyse.
Une fresque labyrinthique avec Diego Calva et Margot Robbie
Tout d’abord, il faut le reconnaître, Babylon est un film ambitieux.
Le plus ambitieux film de Chazelle, certainement, et de ces dernières années, à coup sûr.
Avec Babylon, Damien Chazelle essaye de raconter Hollywood dans son intégralité, d’englober toute l’essence du cinéma.
Y parvient-il ? Difficile à dire…
Si Babylon est à Hollywood ce que Whiplash est au Jazz et La La Land à Broadway, il faut dire que la façon de faire est bien différente.
Dans Babylon, Chazelle a fait un choix stylistique risqué : l’excès.
Partant ainsi dans une sorte d’exacerbation à l’extrême de son style, le réalisateur nous en donne beaucoup, au risque de causer l’indigestion chez certains.
Une narration fragmentée, Brad Pitt et Tobey Maguire
Quand on va voir un film, on peut généralement faire un résumé assez succinct du scénario.
Eh bien, pour tout vous dire, après avoir vu Babylon dans son intégralité, il nous est à peu près impossible de résumer le film.
Pourquoi ? Eh bien, parce que Babylon opte pour une narration fragmentée.
Par exemple, si Brad Pitt est une tête d’affiche du film, à côté de Margot Robbie et de Diego Calva, son arc narratif n’interagit que très peu avec celui des deux autres.
Les personnages de Brad Pitt et Diego Calva, Jack Conrad et Manuel Torres sont souvent côte à côte physiquement.
Pourtant, sur le plan narratif, ils sont presque totalement étrangers et n’ont presque aucune influence l’un sur l’autre.
À l’exception bien sûr du tout début du film, où Jack emmène Manuel sur son premier plateau de tournage.
Et même les arcs narratifs des personnages sont souvent construits de telle manière qu’il serait incorrect de vraiment parler d’arcs.
Il serait plus correct de parler de vignettes déconnectées.
La séquence surréaliste avec le personnage incroyable incarné par Tobey Maguire dans une espèce de donjon souterrain médiéval renfermant un freak show en est particulièrement symptomatique.
Elle nous fait en effet nous poser plusieurs questions : pourquoi cette scène ? Quel est son lien avec le reste du scénario ? Quel est le propos de celle-ci ?
On vous laisse vous en faire votre propre interprétation quand vous irez voir le film !
En vérité, cette scène est tout bonnement fascinante par sa déconnexion totale, que ce soit en termes de ton comme en termes de scénario, avec le reste du film.
Et pourtant, c’est peut-être un des meilleurs moments du film !
Enfin, sans vouloir vous spoiler, tous les arcs de chacun des personnages se terminent d’une manière peu satisfaisante…
À l’exception de celui de Sidney Palmer, le trompettiste de jazz interprété par Jovan Adepo, ce qui nous rappelle l’amour de Chazelle pour le jazz.
À noter le cas particulier de Diego Calva qui a droit à une scène finale très satisfaisante, mais complètement détachée de l’arc du personnage.
Une scène finale splendide qui veut surtout conclure le propos du film en lui-même et résumer le film, le cinéma, et l’art tout entier.
Une direction hyperactive et un montage parfois épileptique
Si vous êtes sujet à l’hyper-stimulation sensorielle, nous ne vous conseillons pas d’aller voir Babylon. Du moins pas au cinéma.
Et c’est un véritable conseil ! À plusieurs reprises, Babylon devient très difficile à regarder tant les stimuli sont intenses.
Car oui, Babylon est un film épuisant ! On en ressort lessivé, et il faut plusieurs heures pour récupérer son énergie.
Alors ça ne veut pas dire que le film est mauvais. Bien au contraire, certains des meilleurs films sont ceux qui savent mettre mal à l’aise.
Mais tout de même, Babylon flirte dangereusement avec la limite.
Le montage est particulièrement symptomatique de cet effet. La grande majorité de celui-ci est composée de plans qui ne durent que quelques fractions de secondes.
Un montage typique des bandes-annonces, mais guère adapté à un film de deux trois heures.
Quand le montage ne s’adonne pas à la succession de plans en mode praxinoscope, il s’essaye au plan-séquence.
Des plans-séquences à la fois très sophistiqués et très rapides, qui donnent à voir le chaos des orgies des années 1920, mais qui peuvent donner un peu la tête qui tourne.
Même la bande-son s’y met !
La bande son de Justin Hurwitz, constamment parfaite
S’il y a bien une chose qui est excellente dans Babylon, c’est la musique !
Pas très étonnant quand on parle d’un film de Chazelle, nous direz-vous !
Eh bien oui, mais il n’empêche qu’il faut parler de cette bande-son du toujours aussi excellent Justin Hurwitz.
Le compositeur attitré de Chazelle a d’ailleurs remporté un Golden Globe pour cette composition magistrale !
Dans Babylon, Justin Hurwitz rend non seulement un hommage vibrant au jazz, comme c’était déjà le cas dans presque toutes ses compositions avec Chazelle.
Il parvient également à capturer toute l’essence de Hollywood, et même de réinventer certaines des plus grandes œuvres de la musique classique, rien que ça !
C’est ainsi que les hommages très évidents à La Jeune fille et la Mort de Schubert et au Boléro de Ravel sont presque supérieurs aux originaux, tout en apportant un caractère absolument unique absent de ces derniers.
Quelques-uns des thèmes les plus mémorables du cinéma de ces dernières années sont peut-être bien cachés dans cette bande-son !
Une façon de filmer purement hollywoodienne
Un des choix techniques les plus intéressants de Babylon est peut-être dans la post-production.
En effet, Chazelle a choisi d’ajouter un petit effet à peine perceptible, un mélange d’un certain grain et d’un certain étalonnage qui donne à Babylon un côté subtilement rétro.
Un effet qui, se mêlant à la bande-son déjà citée plus haut, crée une esthétique qui en elle-même se veut un hommage au cinéma, non pas des années 1920, où se déroule le film, mais plutôt des années 1930 à 1960.
Sans pour autant donner au film un aspect vieillot !
L'effet choc, plus très subversif en 2023
Babylon est un film qui se veut subversif.
On le voit dès les premières secondes du film, avec la scène de l’éléphant (on ne vous en dit pas plus), et ça se poursuit tout au long du film.
Quoique le film s’assagisse considérablement dans sa deuxième moitié.
De fait, dans la première moitié du film, environ une scène sur deux tente de nous choquer d’une manière ou d’une autre.
Pour cela, elle doit faire appel à au moins une des choses suivantes : exhibitionnisme, mort absurde, cruauté animale, overdose de drogue dure ou humour scatologique.
Ce film aurait sans doute fait scandale il y a encore quelques décennies, mais en 2023, l’effet choc n’est plus très présent.
Et c’est bien là le souci : une fois que ces sujets ont perdu de leur côté subversif, ils en deviennent plutôt ennuyeux.
Pour compenser la lassitude que nous avons développée, Chazelle a décidé d’opter pour la surenchère en termes de quantité.
Ce qui n’a malheureusement pour effet que de nous désensibiliser encore plus.
Des acteurs au sommet de leur art
Avec un film tel que celui-ci, on ne pouvait pas avoir autre chose que des performances d’acteurs exceptionnelles.
Mais il reste tout de même bon de saluer le travail des têtes d’affiches.
La meilleure performance dans tout le film est probablement celle de Tobey Maguire, ce qui est finalement assez dommage, tant il apparaît peu.
Mais force est de reconnaître que c’est incontestablement un rôle des plus légendaires.
Brad Pitt est pareil à lui-même dans Babylon, c’est-à-dire excellent…
L’énergie qu’il insuffle dans le personnage de Jack Conrad participe énormément à en faire un des personnages les plus attachants du film.
Quant à Diego Calva, il faut saluer la performance d’un acteur relativement nouveau dans un film où il est presque entièrement entouré d’acteurs au talent bien connu.
Diego Calva parvient sans difficulté à s’imposer dans le rôle principal.
Mais bien entendu, si on ne parle pas du court rôle de Tobey Maguire, force est de reconnaître que la performance de Margot Robbie est exceptionnelle.
C’est d’ailleurs probablement le personnage de Nellie LaRoy qui est le plus mémorable de tous les personnages du film.
Le grand point fort de Babylon : l’hommage au cinéma
Babylon reste un grand film, et ceci pour une raison principale : son hommage au cinéma.
Si on vous a dit que Babylon ressemble plus à une série de vignettes qu’à un tout cohérent, il faut reconnaître une série de grands moments hommages au cinéma. Et quelques scènes particulièrement spectaculaires.
Le final, scène qui, prise toute seule, est l’hommage ultime et parfait au cinéma, est une scène typique de Damien Chazelle, qui montre toute la force et le talent du réalisateur.
De même, on a droit, dans les scènes du personnage très attachant, il faut le reconnaître, de Brad Pitt, à certaines réflexions tout à fait magnifiques non seulement sur le cinéma, mais aussi sur l’art en général…
La bande-annonce de Babylon
Babylon sort le 18 janvier. Alors si ça vous intéresse, foncez ! C’est une ode au cinéma qui séduira tous ceux qui aiment rêver au mythe d’Hollywood…
Et en attendant, n’hésitez pas à consulter notre article sur les costumes de Babylon !